3 types d’interventions possibles pour accélérer l’adoption de nouveaux comportements
Entre « ne rien faire » et la « coercition », il existe différentes stratégies possibles pour accélérer l’adoption des changements et des nouveaux comportements au sein de votre organisation.
Lorsque vient le moment d’amener les membres de son équipe à adopter de nouveaux comportements, peu de gestionnaires et de dirigeants maîtrisent l’expertise nécessaire pour faire adopter efficacement ces changements et minimiser la résistance.
Que ce soit pour l’adoption de nouvelles méthodes de travail, pour augmenter l’utilisation d’un nouveau système informatique ou pour améliorer le niveau de service offert aux clients, ces projets ont en commun l’adoption de nouveaux comportements.
Lorsque des initiatives de changements sont lancées au sein d’une équipe ou dans l’ensemble de l’organisation, la plupart des entreprises utilisent généralement l’approche CQSEUBI (ce qui semble être une bonne idée)! Cette approche, aussi connue sous le nom d’improvisation, consiste à ne pas avoir de stratégie préalable et à gérer la résistance à mesure qu’elle émerge. Nul besoin de spécifier que cette manière de faire donne habituellement des résultats très mitigés et augmente le niveau de frustration de ceux qui vivent les changements.
Alternativement, les entreprises plus avant-gardistes utilisent l’influence et des stratégies de gestion du changement pour anticiper la résistance et pour adresser les préoccupations les plus évidentes des employés.
Par contre, de nouvelles approches tirées de la psychologie (behavioural psychology), de l’économie (behavioural economics), du marketing (behavioral marketing) et du design des applications (application behaviour design) ont fait leur apparition au courant des dix dernières années. Bien que d’excellents livres aient été récemment publiés, ces sujets intéressent davantage les universitaires que les gestionnaires en entreprise. Cet article vise donc à augmenter le rayonnement de cette approche d’intervention.
Le design comportemental pour faire adopter de nouvelles manières de faire
Le design comportemental s’intéresse à la façon dont les actions choisies influencent les comportements humains. Cette approche considère que les artefacts (le contexte, l’environnement, etc.) ont une influence importante sur les comportements, les décisions et les actions qui sont ensuite pris par les employés.
Alors que la gestion du changement se concentre typiquement sur les aspects d’influence, le design comportemental inclut ces éléments en plus d’y ajouter des « petits coups de coude » (traduction libre de « nudges »).

Les types d’interventions possibles peuvent être regroupés en quatre catégories.
Ne rien faire
Cette approche est celle généralement utilisée lorsque les gestionnaires n’ont pas défini préalablement de stratégie pour soutenir la mise en place des changements et l’adoption de nouveaux comportements.
Bien que cette approche soit fréquemment utilisée, les conséquences sont une augmentation de la résistance au changement, une augmentation du niveau de stress pour ceux qui vivent les changements (pouvant entraîner des problèmes de santé), le départ de certains employés et l’augmentation des délais pour l’adoption des changements.
Nul besoin de spécifier que cette approche n’est pas une stratégie en soi, mais bien l’absence de stratégie.
Influence
Une approche proactive augmente les chances de succès dans l’adoption des nouvelles manières de faire. La gestion du changement est fréquemment la stratégie employée après que la résistance au changement se soit manifestée et que les conséquences négatives de ne rien faire commencent à se faire sentir.
Certaines des actions les plus fréquentes pour une stratégie d’influence sont :
Informations : La préparation de communications expliquant les raisons derrière les changements, les actions prises pour les mettre en place et les bénéfices anticipés font partie des informations partagées aux employés.
Éducation : Cette approche consiste à développer des programmes de formation pour développer les nouvelles connaissances nécessaires afin que les employés soient en mesure d’adopter les nouveaux changements.
Coaching : Le coaching est une forme d’accompagnement offert aux personnes affectées par les changements afin qu’ils puissent partager leur résistance et éventuellement développer leurs compétences et leurs habiletés.
Démonstration : La démonstration consiste à rendre visibles les nouvelles manières de faire en les démontrant concrètement.
Petits coups de coude (nudging)
Au-delà de l’influence, la théorie des « petits coups de coude » accélère l’adoption des changements en modifiant le contexte ou l’environnement dans lequel évoluent les employés.
Le concept des petits coups de coude a été popularisé dans le livre intitulé Nudge: Improving Decisions About Health, Wealth, and Happiness, rédigé par deux universitaires américains de l’Université de Chicago: l’économiste Richard Thaler et le juriste Cass Sunstein.
Le concept des petits coups de coude repose sur la psychologie du comportement. Il propose des stratégies indirectes comme moyens d’influencer le comportement et la prise de décision de groupes ou d’individus.
L’architecture des choix : L’architecture des choix est la conception de différentes manières de présenter les options possibles aux utilisateurs afin d’influencer leur processus de prise de décision et conséquemment leurs actions. En modifiant la manière dont les différents choix sont présentés, il est fort possible d’influencer les comportements adoptés par les employés.
Par exemple, en attirant l’attention sur l’option « Premium », le service WordPress tente d’influencer les utilisateurs à choisir cette option parmi les différents choix. À noter que l’option « Free » (gratuite) attire moins l’attention que les options payantes. L’architecture des choix offre tout de même différentes options possibles. Cependant, la manière de présenter ces choix a une influence directe sur les décisions des utilisateurs.



Altération de l’environnement : L’altération de l’environnement consiste à mettre en place des éléments additionnels dans l’environnement afin d’influencer les comportements des individus.
Par exemple, plutôt que d’afficher des panneaux demandant aux automobilistes de réduire leur vitesse, des auto-collants de grande dimension ont été collés sur la voie publique donnant l’illusion de nids de poule forçant ainsi les automobilistes à ralentir. Plutôt que d’utiliser des panneaux de signalisation de la vitesse maximale, l’altération de l’environnement permet d’influencer plus efficacement les comportements des automobilistes.



Un autre exemple consiste à ajouter des éléments visuels forts afin d’amener les enfants à se laver les mains. Plutôt que d’utiliser la coercition, les traces de pas sont une manière ludique d’influencer positivement certains comportements désirés.



Incitatifs et récompenses : L’utilisation d’incitatifs et de récompenses est aussi une tactique fréquemment utilisée pour transformer certains comportements.
Par exemple, la ville de Stockholm a utilisé un panneau indiquant la vitesse des automobilistes. Avec l’utilisation d’une caméra, les automobilistes fautifs sont punis par l’émission d’une contravention. Cependant, les automobilistes ayant respecté la limite de vitesse sont automatiquement inscrits à un tirage leur permettant de remporter une loterie provenant de l’argent versé par les automobilistes fautifs.



Coercition
Dans les organisations traditionnelles ou lorsque l’autorité est le moyen préféré pour faire adopter des changements, la coercition est fréquemment la stratégie par défaut.
Alors que la coercition peut être une stratégie appropriée en situation de vie ou de mort, elle s’avère une stratégie peu efficace dans un contexte où les employés valorisent l’autonomie et la variété de leurs choix.
Restreindre ou éliminer les choix possibles : Parmi les stratégies de coercition, on retrouve l’élimination de certains choix possibles.
Par exemple, pour améliorer la circulation dans certaines rues, un règlement est mis en place visant à empêcher et éventuellement punir certains comportements, telle que la circulation dans les deux sens.



Imposer des pénalités : L’imposition de pénalités est une manière coercitive d’accélérer l’adoption des comportements.
Par exemple, les utilisateurs du métro de Londres seront punis de 2 manières s’ils enfreignent de payer leur entrée dans le métro.



Décréter des règles : En décrétant certaines règles spécifiques, il est possible d’influencer les comportements.
Par exemple, les panneaux d’interdiction de stationnement (combinés à l’utilisation de pénalités financières) visent à influencer les comportements des automobilistes.



Conclusion
Alors que la réduction de la résistance au changement est à l’agenda de plusieurs gestionnaires, les manières traditionnelles utilisées pour éliminer cette résistance donnent souvent des résultats décevants.
Entre « ne rien faire » et utiliser la « coercition », il est possible de développer des plans d’interventions positifs qui favorisent l’adoption des nouveaux comportements. Le design comportemental offre des approches qui vont au-delà de la gestion du changement traditionnel.
Influencé par la psychologie, l’économie, le marketing et le design des applications, le design comportemental est déjà utilisé dans différentes sphères de la vie courante. Avec une bonne réflexion et un peu de créativité, elle est possible d’utiliser ces approches pour influencer efficacement les comportements des employés en entreprise.
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